Kerguelen
Yves, le mari de Marie-Anne, étant décédé entre-temps, Marie-Anne a quitté Keriniel alors que Corentin
le Gall prenait la ferme. Il n'était pas possible pour Marie-Anne de prendre en charge la ferme de
Keriniel car elle se retrouvait sans mari et sans enfant. Sans doute Marie-Anne est-elle partie avec un
pécule et quelques meubles personnels conformément au contrat de mariage qu'elle avait signé avec feu
son mari.
Quelques années auparavant, en 1870, sa soeur Catherine avait épousé un veuf, Corentin Sclaminec et vivait avec ce dernier à Kerguelen.
Elle se rapproche donc de sa soeur et vit en compagnie d'une certaine Marie-Anne Gentric âgée de 12 ans,
probablement de sa famille proche. Marie-Anne a 43 ans et Catherine 34.
Kerguelen est un village composé de plusieurs fermes (tenues) dont celle de Corentin Sclaminec. C'est une ferme modeste
tant par sa taille que par la qualité des terres. Corentin s'était d'abord marié avec Marie Julien en 1855,
Marie avait alors 23 ans c'est à dire un an de moins que son mari.
Ils auront un premier enfant tardivement en 1866, enfant qui ne survivra que 15 jours.
Un autre viendra en octobre 1869, elle a alors 37 ans. L'enfant survivra
mais il faut croire que ce fut un accouchement difficile car elle décèdera au mois d'avril suivant. C'est dans ces
conditions que Corentin va demander un inventaire de sa ferme en vu de se remarier.
C'est l'occasion, à partir du document notarié de savoir ce que contenait une petite ferme en 1870 :
L’an 1870, le 5 juillet, nous Me le Bail notaire à la résidence de Plozévet, canton de Plogastel-Saint-Germain,
arrondissement de Quimper, Finistère, assisté des témoins Henry et Guillaume Gourlaouen, commerçants,
les deux demeurant au bourg de Plozévet,
Rapportons qu’à la requête de Corentin Sclaminec, cultivateur du village de Kerguelen, en la commune de Plozévet,
veuf de Marie Julien, agissant ici tant en privé nom que comme père et tuteur légal de Pierre Sclaminec,
enfant mineur âgé de huit mois, issus de son dit mariage.
Nous nous sommes transportés de nos demeures respectives jusqu’au dit village de Kerguelen en étant arrivés sur les
10h00 du matin avons aussitôt été requis de procéder sur-le-champ à l’inventaire fidèle et description exacte
des meubles et effets mobiliers, blés, bestiaux, titres et papiers ayant dépendu de ladite communauté et ce,
en présence du sieur Pierre Julien, fils, oncle maternel du dit mineur et son subrogé tuteur, et de la manière
suivante et d’après l’estimation par nous faite à l’instant :
Deux trépieds et deux poêles à crêpe, 6 frs
Trois marmites, 9 frs
Deux chaudrons, 1 frs 50 c
Les écuelles, cuillers, assiettes et autres articles de poterie, 2 frs
Deux barattes, bât-crème et seaux, 5 frs
Deux escabeaux, 50 c
Tables, bancs, et nappe 5 frs
Le lit étant près la table, 21 frs avec ses accoutrements
Autre idem 20 frs
Autre idem 8 frs
Une armoire à 5 battants et 2 tiroirs 54 frs
Autres idem, 1 frs
Les tamis et cribles, 2 frs
Les tranches, crocs à frambois et pelles 7 frs
Un seau, 75 c
Une barrique, 3 frs
Les paniers, 2 frs
Un rateau en fer, 1 frs
le rouet à dévider le fil 3 frs
un dévidoir, 50 c
Dans la grange
2 charrettes, 90 frs
2 broye-chanvre 1,50 fr
Une charrue 5 frs
Une herse 1 frs
2 pecelles 1 frs
Dans la crèche
Deux vaches hors d’âge, 90frs
Deux autres idem, 65 frs
Une génisse 35 frs
Deux génisses 40 frs
Deux veaux 18 frs
Un cheval de 7 ans, 150 frs
Le bâts avec ses traits et ses sangles 7 frs
Le bois à feu , 12 frs
Un broye chanvre 1 frs
Des ustensiles pour battre, 1,50 fr
Des ruches 2 frs
Dans le grenier
Orge 15 frs
Avoine 15 frs
50 kilogrammes de blé noir, 10 frs
Un drap à vanner, 6 frs
le fil, 47 frs
3 sacs 3 frs
Une nappe 1 fr
Quatre ruches 20 frs
Le blé en terre
L’orge 60 frs
seigle 72 frs
Froment 72 frs
Avoine 120 frs
Blé noir, 36 frs
Légumes, 30 frs
Hardes de la défunte, 40 frs
Crédit
Il serait dû par Jean le Berre petit fermier pour loyer 75 frs
Argent comptant 175 frs
Total général du présent inventaire 1420 frs 75 c non compris les hardes de la défunte qui restent privatives
au mineur, en compensation de celles du veuf.
Dettes
Le requérant nous a déclaré que sa communauté doit pour argent emprunté, savoir :
A Pierre Jullien, fils, du village du Mengleux en Plozévet , 600 frs
A Alain Julien, cultivateur de Kerguelen 825 frs et à autres particuliers 600 frs, total 1425 frs
Titre et papiers
Du 19 novembre 1856, le Bail, notaire, quittance de 300 frs par Philibert Cabillic et Jeanne Sclaminec, côté et paraphé A numéro premier,
Du 15 mars 1858, le Bail, notaire, quittance de 310 frs par le même au même côté et paraphé B numéros premier
Du 22 décembre 1858, Le Bail, notaire, quittance de 86 frs par Étienne Coader, père, à dit Corentin Sclaminec, coté et paraphé C numéro 1er
Du 27 janvier 1861 le Bail, notaire, quittance de 775 frs par Marianne Coader à Corentin Sclaminec, côté et paraphé D numéro premier
Du 15 janvier 1865, le Bail, notaire, quittance de 300 frs par Anne Guichaoua Coader à ce même, côté et paraphé E numéro premier
Du 19 janvier 1868, le Bail, notaire, quittance par Henri Coader à ce même, coté et paraphé F numéro premier
Du 19 septembre, 1869, quittance générale par Yves le Gall et Anne Coader à ce même, le Bail, notaire côté et paraphé G numéro premier
Et ne s’étant plus rien trouvé à inventorier ni à porter au présent et après avoir reçu de ce Corentin Sclaminec requérant,
le serment qu’il ait été rien détourné des objets composant la dite communauté, nous l’avons aussi interpellé de nous déclarer
s’il est ou non créancier de son enfant mineur, à quoi il a répondu que celui–ci aurait à exercer contre
sa communauté des reprises pour raison des 900 frs de dot immobilisée par sa mère et pour diverses dettes propres
à lui Sclaminec, payées pendant cette communauté.
Fait et passé au dit Kerguelen par simple vacation depuis 10h00 du matin jusqu’à 1h00 de l’après-midi,
en présence des dits témoins lesquels vont signer avec Pierre Jullien, Sclaminec requis de signer a déclaré
ne le savoir faire après lecture…
Kersyvet
Au recensement de 1886, elle est à Kersyvet toujours avec Marie-Anne âgée de 16 ans, comme domestique.
En 1888 Perrine le Brun, sa belle-mère, décède.
Kerguelen
En 1890 la santé de Corentin Sclaminec est très dégradée. Il est maladif et ne peut plus travailler. Serait-il atteint de tuberculose ?
Son fils aîné Pierre, issu de son premier mariage avec Marie Julien, qui vient d'effectuer sa première année sous les drapeaux
est, en tant que soutien de famille, rappelé dans ses foyers pour faire tourner la petite exploitation.
Corentin décède cette année là laissant Catherine veuve avec deux enfants, Marie-Anne et Sébastien Sclaminec.
On sait que Marie-Anne Gentric disposait encore d'un petit pécule à cette époque. En effet dans l'acte de succession il est
indiqué que le ménage Corentin et Catherine avait une dette verbale de 2100frs envers elle.
En 1896 Marie-Anne habite à Kerguelen avec une Marie-Anne Gentric âgée de 9 ans.
Entre-temps Catherine, sa soeur, a déménagé à Kerguelen dans une petite maison avec son fils Sébastien.
En 1901 Catherine a rejoint sa fille Marie-Anne Sclaminec à Kermenguy. Sébastien Sclaminec, son fils, a 16 ans et est resté à Kerguelen comme ouvrier agricole.
En 1909, Marie Anne Gentric perd sa soeur Catherine qui décède à Kermenguy chez sa fille à l'âge de 62 ans.
En janvier 1915 Marie Anne Gentric perd son frère Sébastien (veuf de Anne Thomas depuis 1893) qui décède à Kervinou à l'âge de 62 ans.
Ensuite elle se retrouve seule à Kerguelen au bord de la route de Quimper dans un lieu nommé "Turia moc'h" jusqu'à fin décembre 1938. Elle sera appelée maintenant Marianne "Turia moc'h". Le prénom plus le lieu d'habitation, ce n'était pas spécialement péjoratif même si on peut traduire turia moc'h par quelque chose comme "l'endroit où les cochons fouillent la terre".
S'approchant des 100 ans Marie-Anne fit l'objet d'un article dans l'Ouest-Eclair du 11 mars 1937, avec sa photo la représentant fumant la pipe.
Voici l'article la concernant :
Plozévet, chez la centenaire de Plozévet
Mor-Mariana-ar-Stang !... A quelques centaines de mètres de la grosse agglomération plozévétienne, en bordure
de la route de Quimper, une petite maison basse dont la porte est close. C'est la demeure de Marie-Anne Gentric,
celle que, dans tout le pays, l'on nomme la Centenaire. Frappons fort, car peut-être dort-elle à cette heure,
ou bien est-elle frileusement assise au fond de l'âtre, fumant la courte pipe qui est sa seule compagne.
Non, la porte s'est ouverte et voici qu'apparaît une petite vieille alerte et qui déjà s'étonne.
Que lui veut-on ?... Prendre sa photographie ! Oh mais alors, il faut qu'elle fasse un brin de toilette,
tout au moins que la voisine vienne l'aider à mettre sa coiffe, cette mitre basse en toile jaune, brodée au nœudé,
qui est la coiffure de deuil chez les vieilles Bigoudènes. La voisine est mandée. Elle accourt. Mais déjà tout
le Stang est en émoi. Pour se faire coiffer, la bonne Marie Anne abandonne son dîner, un grand bol de chocolat,
qu'elle vient de préparer. Elle se couche de bonne heure, la Centenaire. D'ordinaire, vers les quatre heures
et demie, cinq heures du soir. Il est vrai qu'elle se lève à 7 heures et demie, 8 heures. Son âge exact ? 99 ans
et deux mois.
Elle est née, nous dit-elle, le 17 janvier 1838. Originaire du village de Merros, en
Plozévet, elle fut mariée à Yves Guellec, de Kéréniel. Elle n'eut jamais d'enfants. Et sans doute son veuvage
remonte-t-il à de nombreuses années, car elle n'est plus connue que sous le nom de Gentric. Elle fut, autrefois,
une guérisseuse renommée. L'on venait la trouver pour les maux de ventre.
L'on venait de très loin, de tous les environs, du Cap même. Et ne dit-on pas qu'elle a guéri jadis un industriel
que les médecins avaient condamné ? Depuis longtemps elle vit seule, vaquant elle-même aux besognes ménagères,
soignant ses lapins, allant chercher de l'eau à la fontaine. Il n'y a pas si longtemps qu'elle s'occupait
encore de son jardin. Marie-Anne Gentric a un lopin de terre et elle jouit d'un petit secours de 50 francs (*) par mois.
C'est peu évidemment, d'autant qu'elle a entendu dire que, dans certaines communes voisines,
les vieillards touchaient 100 francs. Oui, c'est bien maigre, et pourtant, parfois, elle a peur qu'on
lui enlève ce modeste secours. On la rassure. Elle est contente, car, malgré tout,
ça l'aide à vivre.
Oh ! sa vie est bien calme et réglée. Elle se nourrit de peu. De café surtout,
du café à la chicorée. De la soupe. Peu de pommes de terre.
C'est lourd, dit-elle, ajoutant qu'elle n'aime pas le lard salé, mais que, par contre, elle ne dédaigne pas le bœuf bouilli.
De temps à autre, elle reçoit la visite des bonnes religieuses de l'Ecole libre qui lui apportent des fruits, des douceurs...
et du tabac. Car Marie-Anne Gentric fume gaillardement la pipe et la boîte de fer placée sur sa cheminée est toujours garnie
de « gris ». La pipe est sérieusement « culottée ». Mais c'est bon tout de même et quand il fait froid, qu'on est bien à fumer
dans la cheminée de pierre en écoutant pétiller la flambée. Alors le vent peut souffler, la pluie crépiter sur les volets.
Marianne est à sa pipe et à ses souvenirs. Ce coin dans le foyer, c'est son lieu de prédilection. La place est douillette
Marie-Anne avoue qu'elle est frileuse. Frileuse, peut-être. En tout cas, elle est solide et l'âge ne lui a rien ôté de
sa lucidité d'esprit. Dans dix mois, elle pourra fêter ses cent ans. Mais auparavant elle voudrait bien — dit-elle — aller en
auto jusqu'à Quimper. Comme quoi l'on peut être centenaire et vivre avec son temps.
* A cette époque, sur les marchés un lapin coûtait de 12 à 20 francs la pièce, la livre de beurre de première qualité autour de 14 francs, une douzaine d'oeuf
environ 8 francs, 100 kg de pommes de terre 75/80 francs.
Un autre article fut publié le 29 décembre 1937 dont voici le contenu :
Dans 3 semaines Plozévet aura sa centenaire
C'est en effet le 17 janvier 1938 que Mme marie-Anne Gentric aura franchi le cap.
On la nomme déjà la centenaire, au pays de Plozévet, où elle est née le
17 janvier 1838 et qu'elle n'a jamais quitté.
Nous lui avons rendu visite l'an dernier. Nous l'avions trouvée au coin de son feu, assise sous le grand manteau
de la haute cheminée où elle préparait un bol de chocolat.
Et maintenant elle va bientôt franchir le cap qu'il est donné à si peu de
mortels de doubler. Elle est toujours alerte, la vieille Marie-Anne Gentric.
Elle n'a rien changé à ses habitudes. Depuis des années et des années elle
vit seule, dans sa maison de Mor-Marianna-ar-Stang. Sise en bordure de la
route de Quimper à quelques centaines de mètres de la grosse agglomération plozévétienne.
Elle a été mariée jadis, à Yves
Guellec de Kéréniel. Mais c'est si loin qu'elle n'en garde qu'un souvenir imprécis.
La centenaire reçoit peu de visites.
Cependant elle n'est pas abandonnée.
Ses voisins viennent la voir de temps à autre et aussi les bonnes religieuses
de l'école libre qui lui apportent douceurs et tabac.
Marie-Anne Gentric a une vieille pipe « très culottée » qu'elle fume au coin du feu, en rêvant à sa jeunesse.
Seule, elle ne s'ennuie pas. Elle se couche de bonne heure, prépare elle-même ses repas : du café surtout,
quelques légumes, mais peu de pommes de terre. Elle touche le petit secours aux vieillards. Tout le pays de
Plozévet est fier d'elle. Et les gens en
passant sur la route disent : " Voici la maison de la centenaire ".
Plozévet s'apprête à fêter sa doyenne et ce sera un beau jour que ce
17 Janvier 1938 où Marie Anne Gentric aura vécu tout un siècle.
Centenaire
Au moment où Marie-Anne atteignit ses 100 ans le conseil municipal décida qu'il fallait fêter cet évènement inhabituel.
Un petit article parut dans la presse locale, ici dans "le Citoyen" journal des le Bail. C'est Albert le Bail qui est maire à ce moment-là. (maire de Plozévet de 1937 à 1952 )
"Plozévet
Une Centenaire.- Lundi prochain 17 janvier, Plozévet aura une centenaire. En effet, le 17 janvier 1838, naquit
à Plozévet, au village de Merros, Marie-Anne Gentric. Elle se maria, le 21 janvier 1855, avec Yves le Guellec,
né à Plovan, le 15 février 1832. Comme il y a loin depuis ! Les témoins du mariage furent: Charles Deroff,
instituteur public, et Jean le Moal, garde-champêtre.
Depuis de nombreuses années, elle habite seule dans une maison située, route de Quimper, à environ
quatre cents mètres du bourg. Par suite de circonstances indépendantes de la volonté de la Municipalité
et du Syndicat d'Initiative de Plozévet, la fête qui devait avoir lieu dimanche prochain en l'honneur de la centenaire
est renvoyée à une date ultérieure."
Le 16 janvier 1938 une cérémonie religieuse eut lieu à Plozévet pour fêter la centenaire comme l'article du 17 janvier de
l'Ouest-Eclair s'en fit l'écho.
Marie-Anne Gentric a aujourd'hui cent ans.
Une cérémonie religieuse a eu lieu hier en son honneur.
Une centenaire à Plozévet QUIMPER, 16 janvier (.de notre rédaction). — La bonne Marie-Anne Gentric, dont nous avons à plusieurs reprises, entretenu nos lecteurs, la bonne aïeule du pays de Plozévet, a aujourd'hui 100 ans. N'est-elle pas née le 17 janvier 1838 ?... L'alerte Marie-Anne porte allègrement le poids de ce siècle d'existence, qui lui vaut d'être honorée et respectée par tous.
Une fête officielle devait être organisée hier, pour fêter le grand événement local. Mais certaines circonstances la firent reporter à une date ultérieure. La bonne centenaire n'en a pas moins été fêtée et choyée par ses concitoyens. Hier matin en effet, une belle cérémonie religieuse était organisée en son honneur par M. l'abbé Crenn, recteur de Plozévet.
De bonne heure, Mme Marie-Anne Gentric avait communié chez elle. Un peu avant dix heures, la voiture de M. Mourrain venait la prendre à sa maison, située à quelque 400 mètres du bourg, sur la route de Quimper.
A la porte de l'église, la centenaire était reçue par le clergé de Plozévet et conduite dans le chœur, où un fauteuil l'attendait. A ses côtés prenaient place également, deux vénérables aïeuls, Mme veuve Kérisit, née Anne Le Berre, qui eut ses 96 ans le 28 novembre dernier, et Mme veuve Le Gouill, née Perrine Hénaff, 83 ans. ravies de leur rôle de dames d'honneur.
(Mme Le Gouill est la veuve du regretté Sébastien Le Gouill, qui perdit quatre fils à la grande guerre et dont le statuaire a fixé les traits sur le beau monument aux morts de Plozévet).
Les trois bonnes vieilles étaient fortement émues durant toute la cérémonie. Elles suivirent avec ferveur la messe, où le distingué recteur M. Crenn, officiait.
Une foule énorme se pressait dans l'église trop petite. A l'Evangile M. l'abbé Maingant, vicaire, fit en breton un éloquent sermon. Après avoir fait l'éloge de la centenaire et souhaité à tous les paroissiens d'atteindre un âge aussi avancé, M l'abbé Maingant commenta les paroles : « Aimez-vous les uns les autres ».
A la sortie de la grand'messe, de nombreux amis attendaient la centenaire à laquelle chacun tint à prouver, par une délicate attention, sa sympathie et son respect.
Un repas familial réunit ensuite une trentaine de personnes autour de Mme Marie-Anne Gentric, à l'Hôtel des Voyageurs.
Des toasts furent portés à la santé de la vénérable aïeule qui, ce soir, dans sa maison, rêvera au coin de sa cheminée, au temps lointain de sa jeunesse.
Qu'il nous soit permis d'adresser nos compliments pleins de respect à la bonne centenaire du beau pays de Plozévet.
La visite du conseil municipal, qui avait été reportée, eut lieu le dimanche 30 janvier 1938. Le Citoyen du 5 février :
"Chez la Centenaire.- Dimanche, à l'issue de la réunion du Conseil municipal de Plozévet, M Albert le Bail,
député-maire, accompagné d'une délégation du Conseil, est allé présenter ses voeux à la centenaire, Mme Marie-Anne
Gentric, à son domicile, sur la route de Quimper, à environ 400 mètres du bourg."
Cette photo est prise par Henri Sclaminec un matin de septembre 1938 au domicile de sa soeur Marie épouse Bozec.
Cette dernière était une voisine toute proche de Marie-Anne. Elle et son mari étaient tailleurs d'habits
sur la route de Quimper à hauteur et du même côté que ce qui est aujourd'hui le garage Renault.
Si la maison des Bozec est toujours bien là, celle de Marie-Anne a disparu depuis bien longtemps, il ne reste que la margelle
d'un puits, qui d'ailleurs a été déplacé, et qui alimentait sa maison en eau.
On retrouve sur la photo, Marie Sclaminec (ép Bozec), Jean Bozec qui ici a 5 ans et Marie-Anne qui pour ses 100 ans et quelques
mois est encore tout à fait vaillante.
Décès de Marie-Anne
L'hiver 38/39 qui allait venir fut rude. Une nuit d'hiver particulièrement glaciale Marie-Anne mourrut de froid.
Elle fut retrouvée le 21 décembre 1938 au matin par son neveu Sébastien Sclaminec (fils de Catherine sa soeur) qui
venait lui couper du bois. Elle se tenait sans vie au pied de la cheminée.
Les journaux "le Citoyen" et "le Progrès du Finistère" s'en firent l'écho:
Le Citoyen du 23 décembre :
"La Centenaire est morte victime du froid. - La brave vieille Mme Marie-Anne Gentric, qui habitait
route de Quimper, à la sortie du bourg, est morte la semaine dernière, d'une congestion causée par le froid.
Née le 17 janvier 1838, elle allait donc atteindre ses 101 ans, mais le froid a eu raison de sa robustesse.
En effet un neveu de la centenaire a trouvé cette dernière morte chez elle, au coin de l'âtre.
Le docteur appelé ne put que constater le décès."
Le Progrès du Finistère du 24 décembre :
"Plozévet
LA CENTENAIRE DE Plozévet EST MORTE VICTIME DU FROID. - Depuis un an Plozévet avait sa centenaire,
Mme Marie-Anne Gentric.
Encore alerte malgré son grand âge, "la bonne Marie-Anne" vivait seule
à quelques centaines de mètres du bourg, passant les trois-quarts de son temps assise au coin de l'âtre,
fumant sa pipe et préparant elle-même ses repas.
Née le 17 janvier 1838, elle allait atteindre ses 101 ans,
mais le froid intense qui sévit sur la région aura eut raison de sa robustesse. Mardi matin, un neveu de la centenaire
allant lui rendre visite, l'a trouvée morte, chez elle, près du foyer, sans doute frappée de congestion.
Le docteur appelé, ne put que constater le décès."
L'Ouest-Éclair fit paraître dans ses colonnes un entrefilet dans son édition du Finistère du 22/12/1938 :
La centenaire de Plozévet est morte victime du froid.
Quimper, 20 décembre.
— Depuis un an la commune de Plozevet, située à
25 kilomètres de Quimper, sur la route d'Audierne, avait sa centenaire, Mme Marie-Anne Gentric.
Encore alerte malgré son grand âge,« la bonne Marie-Anne », comme on la nommait dans le pays, vivait seule
dans une petite maison à quelques centaines de mètres du bourg, passant
les trois-quarts de son temps assise au coin de l'âtre, fumant sa pipe et
préparant elle-même ses repas.
Née le 17 janvier 1838, elle allait atteindre ses 101 ans, mais le froid
intense qui sévit sur la région aura eu raison de sa robustesse. Hier matin,
un neveu de la centenaire allant rendre visite à sa tante trouvait celle-ci
morte, chez elle, près du foyer, sans doute frappée de congestion. Le docteur appelé ne put que constater le
décès.
Au mois de janvier dernier une fête religieuse avait été célébrée en l'église
de Plozévet pour honorer la centenaire.